Brèves rencontres avec ma mère, écrit par Dana Reinhardt

[A Brief Chapter in my Impossible Life..., 2006], traduit par Dominique Piat, Éditions Thierry Magnier, « Roman », 2009.

L'histoire : Simone n'a embrassé que deux garçons jusqu'à aujourd'hui. Son amie Cléo, elle, a déjà fait des choses beaucoup plus poussées. Quant à Jake, son frère, il est étonnant de voir à quel point il devient rapidement un jeune homme. Simone ne risque pas de lui ressembler puisqu'ils n'ont pas de liens génétiques. En effet, la jeune fille a été adoptée. Un jour, alors que Simone a d'autres préoccupations, sa mère biologique reprend contact et ses parents l'incitent à répondre à cet appel.

Notre avis : Nous remercions l'auteur d'avoir largement évité les clichés liés à des thématiques très exploitées. Non, ce roman n'est pas un roman « sur » l'adoption, « sur » la maladie, « sur » l'adolescence : il est une véritable œuvre de littérature. Dana Reinhardt est parvenue à exposer la vie d'une adolescente en mettant en avant ses pensées, aussi variées que le seraient celles d'une personne réelle. Le système d'identification à la narratrice fonctionne alors. La richesse et la diversité des situations et des réflexions sont ce qui donne force et pertinente au récit. Expliquons-nous.
D'abord la narratrice n'a pas comme seul soucis sa mère biologique. Durant la première partie du récit, celle-ci est même peu évoquée. Cela montre que Simone tente de penser à autre chose mais, surtout, qu'elle pense réellement à autre chose ! Les romans tentent souvent de plaquer des comportements stéréotypés plaqués comme réponse à une situation. Ici, l'effet de réel fonctionne naturellement, sans artifice.
Ensuite, nous avons apprécié que les situations soient complexes et que l'histoire parte dans de multiples directions. Là encore, le réalisme est obtenu. Nous pensons par exemple aux interrogations religieuses de Simone. La religion est souvent considérée comme un sujet tabou. Les auteurs en parlent peu, ou pas, et, lorsqu'ils en parlent, les mots sont bien pesés et les phrases mesurées. Ici, les vraies questions sont posées. Pas de réponse sous forme de cliché, pas d'esquive maladroite : nous félicitons l'auteur.
Enfin, la construction et l'ensemble du roman sont vraiment bien réfléchis. La temporalité, les effets de style, la langue, le dénouement : rien n'est laissé au hasard et pourtant tout semble naturel. Voici ce que nous appelons une œuvre littéraire !
Bilan : un très bon roman où l'adoption, la religion et les questionnements de chacun ne sont pas présentés comme des tabous ou des clichés.

Mirabilia